Nos agriculteurs sont souvent accusés de nombreux maux : pollution des sols, inondations dues à la destruction du bocage, odeurs nauséabondes, etc. Et pourtant que serait la vie sans nos agriculteurs ? Qui nous fournirait de délicieuses pommes de terre, un de nos emblèmes gastronomiques ? Et que dire de nos fameux chicons ou de nos betteraves sucrières ?

Pourtant, malgré tous les services que nos agriculteurs nous rendent, outre les accusations auxquelles ils doivent faire face, ils sont confrontés à de nombreux autres problèmes. Entre des prix de vente qui ne leur permettent pas de s’offrir un salaire digne de ce nom, les scandales alimentaires à répétition de ces dernières années, l’accaparement des terres par de méga-fermes et la dureté du travail, nos agriculteurs ne sont pas épargnés.

Les méga-fermes et la problématique des prix de vente trop bas

Depuis plusieurs années le problème est régulièrement abordé par les médias : nos agriculteurs ne parviennent pas à joindre les deux bouts. En cause, des prix de vente de leurs produits beaucoup trop faibles. L’exemple du lait est criant à cet égard : en mars 2018, le coût de production d’un litre de lait était estimé à 45,14 centimes d’euro alors que le producteur n’en recevait que 33,91 centimes. Il ne faut pas être très fort en mathématique pour comprendre que ceci n’est pas rentable. Dans le même temps, le lait est vendu en moyenne 1€ dans les supermarchés. Les près de 70 centimes de bénéfices tombent donc dans les poches des distributeurs et des marques.

Cette situation n’est pas seulement celle des producteurs de lait mais c’est celle du monde agricole dans son ensemble. Une situation qui pousse sans cesse les agriculteurs à agrandir leur exploitation afin de réduire les coûts de production, donnant ainsi naissance à des méga-fermes devenant de réelles industries agricoles. Un élevage intensif qui crée bien des torts à nos campagnes.

Ces méga-exploitations tuent l’agriculture locale à petite échelle. Elles tuent nos fermes (en Belgique, ces 35 dernières années, sept fermes sur dix ont disparu) mais aussi nos agriculteurs (il n’existe pas de chiffre pour la Belgique mais en France 400 à 600 suicides d’agriculteurs sont recensés par an). Avec la disparition de notre agriculture locale, c’est un pan important de notre économie qui est mis en péril et autant d’emplois qui disparaissent.

En tant que consommateur, nous avons pourtant le pouvoir d’aider nos agriculteurs à s’en sortir. Comment ? En achetant directement nos produits à la ferme ou en nous unissant dans des groupes d’achats communs et solidaires qui s’approvisionnent chez les producteurs locaux. En évitant ainsi la chaîne des intermédiaires, les produits peuvent être vendus à un prix juste pour les agriculteurs. Et ceux-ci ne sont pas les seuls bénéficiaires puisque le consommateur y gagne également. Il connaît parfaitement l’origine des produits qu’il achète et la façon dont ils sont cultivés.

Et dans notre commune, les fermes ne manquent pas. Elles proposent des produits variés, nous font redécouvrir des légumes oubliés. Tout le monde peut trouver ce qu’il cherche en se rendant directement chez les fermiers ou en participant au Groupement d’Achats Solidaires d’Estaimpuis. Ces produits pourront aussi régaler les palais de nos petites têtes blondes dans les cantines de nos écoles, leur faisant redécouvrir les produits du terroir et leur proposant ainsi une alimentation saine et équilibrée.

Le cercle vicieux des pesticides et engrais chimiques

Après la seconde guerre mondiale, les engrais et pesticides chimiques ont connu un fort essor. Ils ont été perçus comme les clés de l’agriculture moderne. Leur utilisation s’est donc normalisée et personne ne s’en est plaint.

Mais avec le temps, comme tout produit chimique, on a découvert leurs limites et leurs dangers. Danger pour l’homme. Les pesticides sont mis en cause dans le développement de diverses maladies telles que des cancers, des problèmes respiratoires, l’infertilité masculine et des graves malformations des fœtus. Danger pour l’environnement et la biodiversité également. Du haut de mes 30 ans, je n’ai pu que constater la diminution croissante du nombre d’oiseaux et d’insectes qui profitaient des arbres et fleurs de nos jardins par rapport à l’époque de mon enfance ou celle de mon adolescence. Une diminution plus qu’inquiétante quand on sait que certaines espèces de plantes ont absolument besoin des abeilles pour se reproduire. Avec la disparition de ses pollinisateurs, c’est toute notre biodiversité qui est menacée.

Limites aussi puisque ces produits ne cessent d’appauvrir les terres, contraignant les agriculteurs à en utiliser toujours plus pour compenser cet appauvrissement. Un véritable cercle vicieux en bref.

Pas question ici d’incriminer les agriculteurs ! L’utilisation des engrais et pesticides chimiques a commencé à une époque où nous ignorions ces divers éléments. Le fait qu’ils soient toujours utilisés actuellement s’explique par le manque de soutien à nos agriculteurs. Aider nos agriculteurs à se tourner vers une agriculture respectueuse de l’environnement est le rôle du politique notamment. Plusieurs agriculteurs de notre commune ont déjà franchi le pas avec succès et en sont satisfaits. La création d’un réseau d’entraide d’agriculteurs permettant l’échange d’expériences, de connaissances et de bonnes pratiques aiderait ainsi les autres agriculteurs de notre commune à se lancer. L’appui d’experts viendrait compléter cette aide.

Les scandales alimentaires

Ces dernières années, le monde agricole a été secoué par une série de scandales alimentaires en tout genre. Vache folle, dioxine, œufs au fipronil ne sont que quelques-uns des scandales qui ont touché le secteur. Un secteur qui, à chaque fois, a mis du temps à s’en relever. Des scandales qui se multiplient et démontrent une fois de plus les limites de l’agriculture telle qu’elle est habituellement pratiquée.

A nouveau, la solution est entre nos mains. Aider nos agriculteurs à développer une agriculture plus respectueuse de notre environnement, favoriser des prix justes payés aux agriculteurs par le développement de l’achat direct aux producteurs permettra d’échapper à ces scandales de l’agro-industrie. Une confiance retrouvée pour le consommateur et des produits dont la qualité s’améliore. Des prix justes pour les producteurs et une revalorisation d’un métier bien trop souvent décrié. Voilà quelques-uns des bénéfices d’une agriculture différente et d’une consommation locale.

Estaimpuis, commune rurale et fière de l’être

Chaque matin lorsque vous ouvrez votre fenêtre, vous ne pouvez que le constater, les agriculteurs de nos villages contribuent à façonner le paysage de notre belle commune. Ses champs et sa campagne doivent persister. Estaimpuis doit être verte demain !

 

Tatiana Stellian